Par un avis du 10 juillet 2019, le Conseil d’Etat vient de préciser les conditions dans lesquelles la normalité du taux d’intérêt appliqué dans le cadre d’un prêt intragroupe peut être établie, lorsque ce taux est supérieur au taux légal prévu par l’article 39-1-3° du CGI.

Conformément aux dispositions de l’article 212-I du CGI lorsque, dans le cadre d’un prêt intragroupe, le taux d’intérêt appliqué est supérieur au taux légal (1,34% pour le premier trimestre 2019), l’intérêt servi ne peut être admis en tant que charge fiscalement déductible qu’à la condition que le contribuable démontre que le taux pratiqué est équivalent à celui qui aurait pu être obtenu auprès d’«établissements ou organismes financiers indépendants dans des conditions analogues».

En pratique, cette démonstration n’est pas évidente.

L’administration fiscale, confortée par un arrêt récent de la Cour Administrative de Paris[1], n’hésite pas à invoquer le BOI-IS-BASE-35-20-10-20140415, n°100 et n°110, pour réintégrer la fraction des intérêts supérieurs au taux légal lorsque le contribuable prétend les justifier par des taux obligataires, aux motifs que ces taux sont issus des marchés financiers et ne correspondent pas strictement aux taux pratiqués par des « établissements ou organismes financiers indépendants dans des conditions analogues ».

L’avis qui vient d’être rendu le 10 juillet dernier par le Conseil d’Etat à l’occasion d’une affaire dans laquelle le contribuable avait entendu justifier de la normalité du taux pratiqué dans le cadre d’un prêt entre sociétés liées par une étude de comparables qui reposait notamment sur des émissions obligataires réalisées sur la même période par des émetteurs ayant une note de crédit comparable est, à cet égard précieux, malgré les interrogations qu’il suscite déjà.

L’avis du Conseil d’Etat est précieux en ce qu’il :

  • rappelle, en premier lieu, que le contribuable peut établir par tout moyen le caractère normal de l’intérêt servi,
  • précise ensuite que le contribuable peut notamment «tenir compte d’emprunts obligataires émanant d’entreprises se trouvant dans des conditions économiques comparables, lorsque ces emprunts constituent, dans l’hypothèse considérée, une alternative réaliste à un prêt ».

A cet égard, il serait souhaitable que l’administration fiscale suive cet avis et admette que les contribuables justifient valablement la normalité des taux d’intérêts servis à leurs préteurs apparentés en se référant à des emprunts obligataires émis par des entreprises placées dans des situations comparables aux leurs.

Pour autant, le ver n’est-il pas déjà dans la pomme ?

Ne risque-t-on pas d’assister à de nouveaux débats avec les services de l’administration pour apprécier si les emprunts obligataires retenus comme comparables par le contribuable constituent « une alternative réaliste à un prêt » ?

 

Claire Guionnet-Moalic

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[1]              CAA Paris, 31 décembre 2018, n°17PA03018, WB Ambassador