I. Pour les personnes physiques

1. Nouvelles perspectives en matière d’intéressement des salariés et dirigeants :

La loi Macron adoptée le 18 juin dernier réforme favorablement le dispositif des attributions gratuites d’actions (« AGA ») et des Bons de Souscriptions de Parts de Créateurs d’Entreprises (« BSPCE ») et  ouvre, pour l’avenir, de nouvelles perspectives en matière d’intéressement des salariés et des dirigeants.

Les évolutions suivantes méritent d’être soulignées.

  • Pour les AGA (article 34 de la loi)

1. La plus-value d’acquisition, qui était jusque-là imposée dans la catégorie des traitements et salaires, est désormais imposable en tant que plus-value mobilière avec application, le cas échéant, de l’abattement pour durée de détention (abattement de 50% entre deux et huit ans de détention et de 65 % à partir de huit ans de détention dans le cadre du régime de droit commun).

2. La contribution patronale, qui était antérieurement due au taux de 30% lors de l’attribution des AGA, est désormais exigible au taux de 20% à l’issue de la période d’acquisition des actions.

Toutefois, les PME au sens communautaire (entreprises dont l’effectif est inférieur à 250 salariés qui réalisent un CA annuel HT n’excédant pas 50 M € ou dont le total de bilan n’excède pas 43 M €) qui n’ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création sont désormais exonérées de la contribution patronale dans la limite en base du plafond de la sécurité sociale, soit 38.040 € par salarié pour 2015.

3. La contribution salariale de 10 %, qui était exigible lors de la cession des actions, n’est plus applicable aux AGA.

La période minimale d’acquisition des AGA, antérieurement fixée à 2 ans (à laquelle s’ajoutait une période de conservation minimale de deux ans), est réduite à un an et la durée cumulée des périodes d’acquisition et de conservation à deux ans.

  • Pour les BSPCE (article 35 de la loi)

1. Les BSPCE peuvent désormais être émis non seulement au profit des salariés et dirigeants de la société émettrice (comme cela était déjà le cas), mais également en faveur des salariés et des dirigeants de ses filiales détenues à hauteur de 75 % au moins du capital ou des droits de vote,

2. Les sociétés créées dans le cadre d’opérations de restructuration, de concentration, d’extension ou de reprise d’activités préexistantes, qui étaient jusque-là exclues du dispositif des BSPCE, sont désormais autorisées à émettre des BSPCE.

Ce qu’il faut retenir :

Le dispositif des attributions gratuites d’actions et celui des Bons de Souscriptions de parts de créateurs sont favorablement réformés.

Ces adaptations ouvrent de nouvelles perspectives en matière d’intéressement des salariés et dirigeants dont l’application reste subordonnée à la promulgation de la loi annoncée d’ici le 14 juillet prochain et à la publication de son décret d’application.

 

2. Exonération des indemnités transactionnelles versées à l’occasion de la rupture d’un contrat de travail?

Par un arrêt du 1er avril 2015 [1], le Conseil d’Etat a mis fin à sa jurisprudence constante et a appliqué, pour la première fois, le principe posé par le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC du 20 septembre 2013 [2].

Jusque-là, seules les indemnités de rupture octroyées par un juge étaient susceptibles de bénéficier d’une exonération, partielle ou totale, au titre de l’impôt sur le revenu.

Dans sa décision QPC, le Conseil Constitutionnel a considéré que c’est la nature de l’indemnité qui détermine ses modalités d’imposition et non son mode de fixation.

L’Administration et le juge doivent donc rechercher la nature d’une indemnité transactionnelle pour déterminer ses modalités d’imposition. Les exonérations d’impôt ne peuvent être réservées aux indemnités judiciaires, mais doivent également s’appliquer à celles qui sont versées en vertu d’une sentence arbitrale ou d’un accord transactionnel.

En pratique, il appartiendra au contribuable qui entendrait être exonéré au titre d’une indemnité décidée par voie transactionnelle de pouvoir, le cas échéant, établir son assimilation à une indemnité de rupture exonérée au titre de l’impôt sur le revenu.

Ce qu’il faut retenir :

A condition d’établir qu’elle est assimilable à une indemnité de rupture exonérée d’impôt sur le revenu, une indemnité transactionnelle peut bénéficier de la même exonération.

 

II. Pour les personnes morales

 

1. Réforme du régime fiscal du gain issu du rachat par la société émettrice de ses propres titres : Simplification pour l’avenir, réclamations potentielles pour le passé

Le régime fiscal applicable au gain issu du rachat par une société de ses propres titres a été profondément réformé en conséquence de la décision n° 2014-404 prise par le Conseil Constitutionnel le 20 juin 2014.

Depuis le 1er janvier 2015,  le gain issu du rachat par une société de ses propres titres est, dans tous les cas, imposable en tant que plus-value de cession de titres [3] et ce, que l’associé soit une personne physique ou morale, résidente ou non résidente, sans distinguer selon que la société émettrice est elle-même résidente ou non résidente.

En conséquence :

1. Si le cédant est une personne physique résidente : Son gain est soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu avec application, le cas échéant, de l’abattement pour durée de détention: 50% entre deux et huit ans et 65% après huit ans dans le cadre du régime de droit commun (abattement de 50% entre un et quatre ans, 65% entre quatre et huit ans, porté à 85% après huit ans dans le cadre de l’abattement majoré).

Toutefois, si les titres rachetés sont détenus en PEA, le gain constaté lors de leur rachat par la société émettrice est totalement exonéré.

2. Si le cédant est une personne physique non résidente : Son gain échappe à toute imposition en France, sauf s’il est concerné par l’une des trois exceptions suivantes :

  • Si le cédant non résident détient, au jour de la cession ou a détenu à un moment quelconque au cours des cinq années précédentes, une participation substantielle (plus de 25% des droits à bénéfices [4]), son gain est soumis en France à un prélèvement de 45%, sauf disposition plus favorable de la convention éventuellement applicable.

Toutefois, si l’associé non résident est une personne morale établie dans un Etat de l’Espace Economique Européen, il peut par voie de réclamation obtenir la restitution de la fraction du prélèvement de 45% excédant le montant de l’Impôt sur les sociétés dont il aurait été redevable s’il avait été établi en France[5].

  • Si le cédant est établi dans un ETNC[6], l’associé non résident supporte, quelle que soit l’importance de sa participation, un prélèvement en France égal à 75% de son gain.
  • Si la société émettrice qui procède au rachat de ses propres titres est une société à prépondérance immobilière, l’associé non résident supporte un prélèvement en France au taux de 33,1/3%, réduit à 19% pour les personnes physiques.

3. Si le cédant est une personne morale résidente : Son gain est soumis à l’impôt sur les sociétés au taux de droit commun (33.33% hors contributions additionnelles). Toutefois, le gain imposable est réduit à 12 % de son montant (soit une imposition effective de 4%) si les titres rachetés constituent des titres de participation qui ont été détenus depuis plus de deux ans au jour de la cession.

4. Pour la société émettrice : La qualification en tant que plus-value du gain issu du rachat de ses propres titres libère la société émettrice de toutes les obligations de prélèvement qui lui incombaient antérieurement lors de la mise en paiement du prix de rachat de ses propres titres. En particulier, la société émettrice n’est plus :

  • redevable de la contribution additionnelle à l’IS de 3%,
  • tenue de précompter le prélèvement forfaitaire non libératoire de 21% ou les prélèvements sociaux.

Pour le passé, les possibilités de réclamations sont multiples.

Plus précisément, d’ici le 31 décembre 2015:

1. Les sociétés qui ont procédé au rachat de leurs propres titres sont fondées à réclamer la restitution de la contribution additionnelle à l’IS de 3% qu’elles ont acquittée sur le prix de rachat de leurs propres titres dans le cadre d’opérations de réduction de capital non motivées par des pertes dont la mise en paiement est intervenue depuis le 17 août 2012.

2. Les associés personnes physiques sont fondés à revendiquer la restitution de l’excédent d’impôt qu’ils ont supporté comparé à celui dont ils auraient été redevables si leur gain avait été soumis au régime fiscal des plus-values sur titres.

Le tableau ci-après résume l’évolution du régime fiscal comparé (hors prélèvements sociaux) des plus-values sur titres et des revenus distribués depuis 2012.


 

Cession / Rachat de titres effectués en 2012

Cession / Rachat de titres effectués en 2013

Revenus distribués

Imposition au barème progressif de l’IR après abattement en base de 40%

Prélèvement à la source non libératoire de 21% à titre d’acompte sur l’’IR
Possibilité d’option pour le prélèvement à la source libératoire de l’IR au taux de 24%

Plus-values

Imposition au barème progressif de l’IR après abattement en base pour durée de détention

Abattement pour durée de détention :-     20% entre 2 et 4 ans ;-     30% entre 4 et 6 ans ;-     40% au-delà de 6 ans. Abattement de droit commun :-     50% entre 2 et 8 ans de détention;-     65% au-delà de 8 ans de détention.

Abattement majoré[1] :

-50% entre 1 et 4 ans de détention ;

– 65% entre 4 et 8 ans de détention;

– 85% au-delà de 8 ans de détention.

Sur option : Imposition au taux forfaitaire de 19%

3. Les associés non résidents ont la possibilité de réclamer le remboursement total de la retenue à la source qu’ils ont supporté sur le gain issu du rachat par la société émettrice de ses propres titres si leur participation ne caractérisait pas une « participation substantielle »[8].

Les associés non résidents qui détenaient une participation substantielle dans une société établie en France ayant procédé au rachat de ses propres titres sont également susceptibles de présenter une demande en restitution qui sera toutefois limitée à la différence positive éventuellement constatée entre la retenue à la source prévue par la convention fiscale à l’égard des revenus mobiliers et celle applicable aux plus-values sur titres.

4. Les sociétés qui n’ont pu bénéficier du régime mère-fille au titre du gain réalisé lors du rachat par la société émettrice de ses propres titres sont également fondées à réclamer la restitution de l’impôt sur les sociétés qu’elles ont acquitté sur la totalité de leur gain (à comparer avec une imposition sur la base de la seule quote-part de frais et charges de 12% si leur gain avait été qualifié de plus-value à long terme).

Ce qu’il faut retenir :

Depuis le 1er janvier 2015, le gain issu du rachat par une société de ses propres titres est, dans tous les cas, imposable en tant que plus-value de cession de titres.

Pour le passé, les possibilités de réclamations sont nombreuses.

D’ici le 31 décembre 2015, les associés (personnes physiques ou morales, résidents ou non résidents) et les sociétés ayant participé depuis 2012 à une opération de rachat de ses propres titres par la société émettrice sont fondées à réclamer la restitution de l’excédent d’impôt qu’elles ont acquitté comparé à celui dont elles auraient été redevables si leur gain avait été considéré comme une plus-value sur titres.

2. Les sociétés qui ont acquitté la contribution de 3% sur des revenus distribués depuis 2013 ont intérêt à en réclamer le remboursement à titre conservatoire d’ici le 31 décembre 2015

Depuis que la contribution de 3% sur les revenus distribués [9] a été instaurée [10], sa compatibilité de avec le droit communautaire a été mise en doute aux motifs notamment qu’elle :

  • créerait une restriction à la liberté d’établissement par la différence de traitement qu’elle instaure entre les sociétés mères européennes et les sociétés mères françaises percevant des dividendes de leurs filiales françaises. En effet, les filiales françaises distribuant des dividendes à leur société mère française peuvent échapper à la contribution de 3% sur les revenus distribués dès lors qu’elles appartiennent à un même groupe d’intégration fiscale.
  • créerait une différence de traitement entre les filiales et établissements stables français de sociétés mères européennes : les filiales françaises de sociétés mères situées dans un Etat membre de l’UE sont soumises à la contribution de 3% sur les revenus distribués contrairement aux établissements stables.
  • pourrait s’analyser comme une retenue à la source – contraire à la Directive mère-fille – bien que le redevable légal de la contribution soit la société distributrice.
  • créerait une double imposition économique prohibée par le droit communautaire.

La Commission Européenne a finalement engagé, le 26 février 2014, une procédure en manquement à l’encontre de la France.

Dans le cadre de cette procédure, la décision relative la compatibilité ou non de la contribution de 3% avec le droit communautaire ne devrait pas être rendue avant 2017.

Compte tenu des délais de prescription applicables, les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés qui ont procédé à une distribution de leurs bénéfices ont intérêt à réclamer, d’ici le 31 décembre 2015, le remboursement de la contribution de 3% qu’elles ont acquitté depuis 2013.

Ce qu’il faut retenir :

La compatibilité de la contribution de 3% sur les revenus distribués avec le droit communautaire est contestable.Les sociétés distributrices qui ont acquitté cette contribution depuis 2013 ont intérêt à en réclamer le remboursement à titre conservatoire d’ici le 31 décembre 2015.

 

3. Le régime mère-fille se précise !

Le régime « mère-fille »[11] a fait récemment l’objet de plusieurs ajustements qui méritent attention.

Ce dispositif qui vise à éviter que les bénéfices d’une société soient doublement assujettis à l’impôt sur les sociétés (une première fois lors de leur constatation par la société, puis une seconde fois au niveau de sa société mère lors de leur distribution), prévoit que les produits de participation distribués à une société mère constituent un produit non imposable.

Toutefois, la société mère doit réintégrer dans son résultat soumis à l’impôt sur les sociétés au taux de droit commun, une « quote-part de frais et charges » égale à 5% du montant des produits de participation qui lui sont distribués, soit un taux effectif d’imposition de 1.67%[12].

Le régime « mère-fille » est réservé aux sociétés et autres organismes soumis à l’impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent, pendant au moins deux ans, des titres de participation sous forme nominative[13] représentant au moins 5% du capital de la société émettrice. Cette dernière condition est appréciée à la date de mise en paiement des produits.

Les récents ajustements, d’origines légales et jurisprudentielles, apportés à ce régime révèlent sa subtilité.

1. Précision sur l’appréciation du seuil de détention de 5% au regard des droits de vote

Par deux arrêts rendus les 5 novembre et 3 décembre 2014[14], le Conseil d’Etat a considéré que l’application du régime mère-fille était subordonnée à la détention de 5% du capital de la société émettrice et ce, quel que soit le nombre de titres assortis d’un droit de vote.

Toutefois, si les droits de vote détenus représentent moins de 5% du total des droits de vote dans la société émettrice, seuls les dividendes afférents à des titres auxquels sont attachés des droits de vote bénéficient de l’exonération.

Exemple 1

La société A détient 50% du capital de la société B, soit 500 des 1000 titres émis par B. La moitié des titres détenus par A sont assortis d’un droit de vote (soit 25% des droits de vote dans B). B verse un dividende de 200.000 € à A.

Dans cette situation, la société A détient au moins 5% des droits de vote et du capital de B. La société A bénéficie donc du régime mère-fille sur l’ensemble du dividende reçu de B. Ainsi, 95% de ce dividende (soit 190.000 €) est exonéré d’impôt sur les sociétés.

Exemple 2

La société A détient 50% du capital de la société B mais aucun droit de vote. B verse un dividende de 200.000 € à A.

Dans cette situation, la société A, qui ne détient aucun droit de vote, ne peut pas bénéficier du régime mère-fille alors même qu’elle détient 50% du capital de B. Ce dividende de 200.000 € est inclus pour son montant total dans le résultat fiscal de A.

 Exemple 3

La société A détient 50% du capital de la société B, soit 500 des 1000 titres émis par B. Seuls 30 titres détenus par A sont assortis d’un droit de vote (soit 3% du total des droits de vote dans B). B verse un dividende de 200.000 € à A.

Dans cette situation, la société A bénéficie du régime mère-fille sur la portion du dividende attachée aux seuls titres assortis d’un droit de vote, soit sur 12.000 € (30/500 x 200.000 €), qui est non imposable pour 11.400 € (12.000 x 95%).

Exemple 4

La société A détient 5% du capital de la société B, soit 50 des 1000 titres émis par B. L’ensemble de ces 50 titres est assorti d’un droit de vote. Toutefois, en raison du droit de vote double dont bénéficient certains associés, A ne détient que 3% du total des droits de vote dans B. B verse un dividende de 200.000 € à A.

Dans cette situation, bien qu’elle ne dispose que de 3% du total des droits de vote dans B, la société A peut bénéficier du régime mère-fille sur l’ensemble de ses titres dès lors qu’ils sont tous assortis d’un droit de vote.  Ainsi, 95% de ce dividende (soit 190.000 €) est non imposable à l’impôt sur les sociétés.

2. Précision sur la condition de détention des titres pendant au moins deux ans

Dans un premier temps, la Cour Administrative d’Appel de Versailles [15] a considéré que le régime « mère-fille » ne pouvait s’appliquer qu’aux titres qui avaient été conservés pendant au moins deux ans et ce, même si un socle minimal représentant 5% du capital et des droits de vote avait été conservé pendant deux ans.

Dans un second temps, le Conseil d’Etat [16] a considéré que la décision rendue par la Cour Administrative d’Appel de Versailles induisait une différence de traitement entre une société mère française recevant des dividendes d’une filiale française et une société mère française recevant des dividendes d’une filiale établie dans un autre Etat membre de l’Union Européenne et était, à ce titre, non conforme au droit communautaire [17].

En conséquence, pour que le régime « mère fille » soit applicable à l’ensemble des titres, il  suffit qu’un socle minimal représentant au moins 5% du capital et des droits de vote soit conservé pendant le délai de deux ans.

Exemple 

La société A détient depuis plusieurs années 10% du capital social et des droits de vote de la société B. L’espace de 18 mois, A augmente sa participation dans B à hauteur de 50% puis revend l’ensemble de ces titres B. Au cours de la période pendant laquelle elle détient 50% des titres B, A perçoit un dividende de 200.000 €.

Selon le Conseil d’Etat, l’ensemble du dividende reçu bénéficie du régime « mère-fille » même si 40% des titres ont été détenus moins de deux ans.

3. Prise en compte des titres transférés dans un patrimoine fiduciaire, mais non des titres prêtés

Pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2014, il est expressément admis par la loi [18] que les titres transférés dans un patrimoine fiduciaire par une société –qui n’en est donc plus détentrice en pleine propriété- bénéficient du régime « mère-fille » si le constituant conserve l’exercice des droits de vote attachés aux titres transférés ou si le fiduciaire exerce ces droits dans le sens déterminé par le constituant.

En outre, le transfert de titres dans un patrimoine fiduciaire n’interrompt pas le décompte de leur délai de conservation par le constituant.

Exemple 

Une société A transfère le 30 juin 2015 des titres de participation de la société B d’une valeur de 1.000.000 € dans un patrimoine fiduciaire. Ces titres permettent à la fiducie de dégager un bénéfice de 50.000 € correspondant aux dividendes issus des résultats de la société B. A pourra bénéficier du régime « mère-fille » sur ces dividendes et seule une quote-part de 2.500 € (5% de 50.000) restera imposable à l’impôt sur les sociétés.

Au contraire, le Conseil d’Etat [19] a considéré que le prêt de titres -qui emporte sur le plan juridique transfert de propriété- s’assimile à une rupture de l’engagement de conservation des titres.

4. Non application du régime « mère-fille » en cas d’interposition d’une société de personnes

Par un arrêt rendu le 24 novembre 2014 [20], le Conseil d’Etat a considéré que les sommes distribuées à une société française par l’intermédiaire d’une société de personnes ne pouvaient bénéficier du régime « mère fille » au motif que la société française ne détenait pas directement une participation dans la société à l’origine de la distribution de bénéfices.

Exemple :

La société française A détient 98% d’une société étrangère B qui détient elle-même 90% d’une société étrangère C. Au regard du droit français, B est considérée comme une société de personnes et C comme une société de capitaux (qui serait soumise à l’IS si elle était imposée en France).

Si C procède à une distribution de dividendes qui remontent vers A après avoir transité par B, les dividendes reçus par A ne peuvent pas bénéficier du régime mère-fille.

5. Le régime « mère-fille » n’est pas applicable si les produits de participation correspondent à des revenus déduits du résultat imposable de la filiale

Le nouvel article 145, 6-b du CGI introduit par la Loi de Finances Rectificative pour 2014 prévoit, qu‘à compter du 1er janvier 2015, les bénéfices distribués déductibles du résultat imposable de la filiale sont exclus du régime mère-fille.

Exemple

Une société A située en France détient une filiale B dans un Etat étranger. Une somme de 200.000 € est versée par la société B à A. Au regard du droit étranger, cette somme est considérée un intérêt déductible du résultat de B alors que la France traite la somme reçue par A comme un dividende éligible au mère-fille. Cette différence de législation aboutissait à une double exonération du revenu distribué. Désormais, ce type de revenu est exclu du régime mère-fille.

Ce qu’il faut retenir :

Le régime « mère-fille » a fait récemment l’objet de plusieurs ajustements qui portent notamment sur :

l’appréciation du seuil de détention de 5%,

la condition de détention des titres pendant au moins deux ans,

les titres pris en compte.

 

4. Renforcement du crédit d’impôt phonographique :

Un décret publié le 19 juin 2015 [21] vient de préciser les conditions selon lesquelles les entreprises de production phonographique [22] peuvent, depuis le 1er janvier 2015 et jusqu’au 31 décembre 2018 [23] au moins, bénéficier d’un crédit d’impôt renforcé au titre des dépenses engagées pour la production d’albums de talents nouveaux, c’est-à-dire d’artistes, groupes d’artistes, compositeurs ou artistes-interprètes qui n’ont encore jamais produit d’album ou, qui s’ils en ont déjà produits, n’ont pas vendus au moins deux albums à plus de 100.000 exemplaires chacun.

Le taux du crédit d’impôt phonographique reste fixé à 30 % des dépenses éligibles de l’exercice pour les PME au sens communautaire [24].

Le dispositif du crédit d’impôt phonographique est amélioré sur les quatre points suivants[25] :

1. son plafond annuel (antérieurement fixé à 800.000 €) est porté à 1.100.000 € à partir du 1er janvier 2015.

2. Le crédit d’impôt phonographique, jusque-là réservé aux entreprises constituées depuis plus de trois ans, peut désormais bénéficier aux entreprises immatriculées depuis un an au moins.

3. Les entreprises, autres que les PME, qui jusque là ne bénéficiaient du crédit d’impôt phonographique que si le nombre d’albums publiés au cours de l’exercice était supérieur au nombre moyen de leurs publications d’albums de talents nouveaux au cours des deux exercices précédents, après application d’une décote de 70 % bénéficient, depuis le 1er janvier 2015, du crédit d’impôt phonographique quel que soit le nombre d’albums publiés au cours d’un exercice et sur l’ensemble de leurs dépenses de production.

En revanche, le taux de leur crédit d’impôt phonographique, antérieurement fixé à 20 %, est désormais réduit à 15 %.

4. Pour les petites entreprises au sens communautaire [26], les dépenses éligibles au crédit d’impôt phonographique sont étendues à compter du 1er janvier 2015 à la rémunération des dirigeants [27] impliqués directement dans la réalisation d’œuvres musicales, dans la limite de 45.000 € par an [28].

Ce qu’il faut retenir :

Le crédit d’impôt phonographique est renforcé depuis le 1er janvier 2015.

 

 


 

[1]  N°265253

[2]  Décision QPC n°2013-340

[3]  Jusque-là ce gain était imposable en tant que revenu de valeurs mobilières.

[4]  Pour les associés personnes physiques, le seuil de détention de 25% s’apprécie en faisant masse des droits dans les bénéfices sociaux détenus avec le conjoint, leurs ascendants et leurs descendants.

[5] BOI-IS-RICI-30-20-20130311, n° 127.

[6] Sont actuellement considérés (arrêté du 17 janvier 2014) comme des Etats et Territoires Non Coopératifs le Botswana, Brunei, le Guatemala, les Iles Marshall, les Îles Vierges britanniques, Montserrat, Nauru, Niue.

[7] L’abattement majoré est applicable, sous conditions, aux cessions de titres de PME au sens communautaire acquis ou souscrits dans les 10 ans suivant leur création, aux cessions familiales et aux cessions par les dirigeants partant à la retraite.

[8]  Au sens de l’article 244 bis B du CGI, un non résident est réputé détenir une participation substantielle lorsqu’il détient ou a détenu à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession, directement ou indirectement, avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants, plus de 25% des droits aux bénéfices.

[9]  Plus précisément « contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés au titre des montants distribués ».

[10] Deuxième Loi de finances rectificative pour 2012 du 16 août 2012.

[11] Articles 145 et 216 du CGI.

[12] 5 x 33.33% = 1.67%.

[13] C’est-à-dire que le nom de l’actionnaire est inscrit dans les registres de la société émettrice.

[14] CE, n°370650, min. c/Sté Sofina et CE n°363819, min. c/ Sté Financière Pinault.

[15] CAA Versailles 18 mars 2014, n° 13VE00873, Sté SA Technicolor.

[16] CE, 15 décembre 2014 n°380942.

[17] Directive Européenne 90/435/CEE du 23 juillet 1990.

[18] Article 145, 1-c du CGI introduit par l’Article 71 de la Loi de Finances Rectificative pour 2014.

[19] CE, 26 septembre 2014 n°363555, Sté Artémis Conseil,

[20] CE, 24 novembre 2014 n°363556, plén, Sté Artémis SA.

[21] Décret n° 2015-704 du 19 juin 2015.

[22] Au sens de l’article L. 213-1 du code la propriété intellectuelle, soit en règle générale les entreprises identifiées par le code NACE 5920 Z.

[23] Ce crédit d’impôt qui devait initialement cesser de s’appliquer le 31 décembre 2012, a été prorogé une première fois jusqu’au 31 décembre 2015, puis pour une nouvelle période de trois ans, jusqu’au 31 décembre 2018.

[24] Entreprises employant moins de 250 salariés qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur ou égal à 50.000.000 € ou dont le total de bilan est inférieur ou égal à 43.000.000 €.

[25] Ces améliorations ne seront effectives qu’après validation du dispositif réformé au regard de la réglementation européenne sur les aides d’Etat par la Commission européenne.

[26] Entreprises employant moins de 50 salariés et dont le chiffre d’affaires ou le total bilan est égal à 10.000.000 €.

[27] La notion de dirigeant au sens de ce dispositif devrait être prochainement précisée.

[28] A noter : La deuxième loi de Finances 2014 qui a réformé le crédit d’impôt phonographique avait fixé à 50.000 € le plafond de la rémunération annuelle des dirigeants susceptible d’être prise en compte dans l’assiette des dépenses éligibles. Le Décret du 19 juin 2015 a réduit ce plafond à 45.000 € par an.